La prélature personnelle de l'Opus Dei au service de la tâche de l'évangélisation de l'Église (Conférence, CEFA, Kinshasa, Novembre, 2007)
La mission essentiellement évangélisatrice qui caractérise L'Église trouve sa justification impérative dans las paroles de Jésus adressées aux Apôtres: "Toute autorité m'a été donnée dans le ciel et sur la terre. Allez donc, et faites disciples toutes les nations... Et voici, moi je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la consommation du siècle" (Mt 28:18-20). Il convient d'ajouter que l'évangélisation est un ministère, un service ("je suis au milieu de vous comme celui qui sert": Lc 22:27), confié aux Apôtres par Jésus-Christ de qui ils avaient reçu son propre pouvoir sacré à exercer à travers les âges afin de servir le Peuple de Dieu, de le sanctifier, de le enseigner, de le guider vers son destin définitif; et, à travers de l'agir de ce Peuple, de porter la lumière du Christ a tous les hommes, à tous les chemins humains, en renouvelant ainsi la création entière (cfr. Rom 8:19-23).
Ce pouvoir sacré serait communiqué par les Apôtres [1] à d'autres. Ainsi ils ont nommé les premiers diacres pour s'occuper de certaines activités matérielles et d'organisation, pendant qu'eux-mêmes se consacreraient aux missions plus fondamentales de la prière et de la prédication (Actes 6:2-4). Ils envoyèrent quelques-uns d'entre eux-mêmes ou des autres disciples bien prouvés pour des différentes missions, parfois en couvrant un grande zone géographique - c'est le cas de Paul et Barnabé; - parfois pour s'occuper d'un secteur particulier, comme Tite en Crète.
Avec le passage des siècles et sur la base de la succession apostolique, l'exercice du pouvoir sacré en service du Peuple de Dieu a commencé logiquement à se résoudre en une division de responsabilités et de juridictions avec une base territoriale. D'abord les Patriarcats et puis les diocèses []. En raison de la stabilité habituelle de la grande majorité de la population, cette division territoriale dans le gouvernement hiérarchique était évidemment la plus appropriée et a duré jusqu'à nos jours.
C'était à conséquence des remarquables changements dans la vie sociale, témoignés dans les derniers temps, qu'on a commencé a pondérer la convenance de introduire d'autres modes de gouvernement hiérarchique, sur une base non-territoriale. Au cours du vingtième siècle, en effet, la stabilité sociale est bouleversée par le phénomène de l'émigration massive: émigration d'un pays en autre et, au dedans du même pays, émigration de la campagne aux villes, avec la conséquence que les communes normales se convertissent de plus en plus en des méga-villes où grande partie des gens se perdaient dans une vie matérialiste et dépersonnalisée
Ces changements ont créé des difficultés substantielles pour une attention pastorale adéquate. Dans des pays avec une immigration à grande échelle, il est devenu fréquent de constituer des paroisses pour des classes particulières de personnes, au moins pour un temps; par exemple des paroisses Italiennes, des paroisses Polonaises, des paroisses Philippines, etc. (aux Etats-Unis, dans la première moitié du siècle dernier, en Angleterre ou ailleurs, encore de nos jours...). Surtout dans les grandes villes, on a pris conscience de plus en plus de la nécessité de faire arriver le message du Christ aux gens où ils travaillent ou se réunissent, parce que autant de fois c'était en vain attendre qu'ils prennent contact avec la vie paroissiale.
Nous arrivons ainsi au Concile Vatican II convoqué, on le sait bien, avec le but spécifique de trouver des manières plus efficaces de faire arriver le message salvifique de l'Église au monde moderne. Le mot populaire d'exprimer ce but était l'aggiornamento, o une mise à jour de l'Église sans exister encore aucune idée précise de ce que ça signifierait. Après les premières sessions, on commençait a voir clairement que les Pères conciliaires étaient prêts à considérer des approches assez radicales a cette tâche de mise-à-jour. Évidemment (faut-il encore insister sur ce point?) on ne prétendait pas que cet aggiornamento changât rien de la doctrine salvatrice qu'on avait reçue dès le commencement; l'intention était plutôt d'étudier et d'améliorer les méthodes pastorales utilisées pour propager cette doctrine; et aussi, si ça paraissait opportun, de remodeler les structures que le droit humain avait données à l'organisation interne de la même Église.
C'est ce dernier point qui nous intéresse plus. À la fin de pourvoir aux besoins créés par les situations que nous avons ébauchées, les Pères conciliaires ont recommandé la création de nouvelles structures juridictionnelles plus flexibles et, pour ce qui concerne notre thème de plus près, ils ont pondéré et approuvé la possibilité que certaines tâches ou initiatives pastorales se pourraient organiser plus efficacement sur une base personnelle et non exclusivement territoriale.
C'est dans ce sens que le Décret conciliaire Presbyterorum Ordinis indique: "Là où les conditions de l'apostolat le réclameront, on facilitera non seulement la répartition adaptée des prêtres, mais encore les activités pastorales particulières pour les différents milieux sociaux à l'échelle d'une région, d'une nation ou d'un continent. Il pourra être utile de créer à cette fin des séminaires internationaux, des diocèses particuliers ou des prélatures personnelles..." (n. 10).
Le pas suivant allait être donné, en 1966, avec le Motu proprio Ecclesiae sanctae de Paul VI. Celui-ci établit que "pour accomplir des spéciales tâches pastorales ou missionnaires pour plusieurs régions ou groupes sociaux qui exigent une assistance spéciale, des prélatures peuvent être utilement établies par le Saint Siège. Celles-ci consisteraient en prêtres du clergé séculier spécialement formés et sous le gouvernement d'un prélat propre [3] et à régir par des propres statuts". Il ajoute, "il n'y a aucune raison pour que des laïcs, qu'ils soient célibataires ou mariés, ne puissent pas consacrer leur service professionnel, à travers des contrats avec la prélature, à ses oeuvres et initiatives" [4]. Les canons 291-294 du Code du Droit Canonique de 1983 concrétisent ces indications de forme législative.
C'est dans ce contexte historique et juridique que l'Opus Dei a été érigé comme Prélature Personnelle par Jean Paul II en 1982. Sa nature est claire. Une Prélature avec son propre Prélat et son propre presbyterium de clergé séculier, mais composé principalement de fidèles laïcs ordinaires qui s'engagent, à travers un lien contractuel, à poursuivre la sainteté personnelle dans et à travers leur vie séculière habituelle, et à chercher de propager parmi ses concitoyens et compagnons de travail la merveilleuse conscience de ce qu'on peut établir amitié avec Dieu et l'aimer dans tous les moments de la vie ordinaire.
La Prélature est internationale dans son étendue. Son but fondamental est d'être source de direction spirituelle des individus - des membres et des non-membres, des catholiques ou des non-catholiques - qui veuillent mettre Dieu au centre de chaque aspect de leur vie de chaque jour. Ce but a un enlargissement logique et naturel envers ces compagnons de travail avec lesquels les membres ont un contact quotidien et qui ne professent aucune croyance religieuse explicite ou se déclarent agnostiques ou même athées. Dans ces cas le but enlargi c'est d'être source et soutien des idéaux humains - de honnêteté, de sincérité, d'une amitié ou d'un amour respectueux et fidèle, de compréhension, des désirs de pardon et de paix - que toute personne de bonne volonté conserve de quelque façon dans son coeur, tout en rappellant que dans le monde moderne il est facile d'abandonner ces idéaux a moins qu'on arrive a connaître quelque collègue ou ami qui cherche sincèrement à les conserver et à les mettre en pratique.
Et avec ça nous avons décrit l'objectif de toute l'activité de la Prélature. Au-delà de ça la Prélature n'a aucun but ou programme. Il y a plusieurs activités "collectives" de nature éducative ou sociale dans lesquelles la formation spirituelle et doctrinale est confiée à l'Opus Dei. Avec l'exception du petit nombre de membres qui puissent travailler dans ces activités collectives, toutes les autres activités des membres - qu'ils les réalisent seuls ou bien conjointement avec d'autres personnes - leur sont tout à fait personnelles, voire, faites avec toute la liberté et, bien entendu, toute la responsabilité personnelles correspondantes à tout citoyen normal.
Si l'on tient compte de cela, il ne devrait y avoir aucune difficulté pour situer et comprendre l'activité de l'Opus Dei dans les fonctions juridictionnelles et territoriales de chaque Église locale. Les membres laïcs de la Prélature sont en même temps fidèles du Diocèse et fidèles de la Prélature, quoique sous des aspects légèrement différents. En toutes les matières où le reste des fidèles du Diocèse dépend de leur Évêque - la discipline concernant la liturgie, les jours sacrés, la loi du jeûne, la célébration du mariage, etc. - ils se trouvent sous la juridiction de l'Évêque local. Ils sont sous la juridiction du Prélat de l'Opus Dei (ou de son Vicaire) pour les matières qui intéressent la recherche personnelle de chacun pour sanctifier tous les aspects de sa vie et son travail séculier. Il s'agit des juridictions juxtaposées, ou mieux cumulatives, qui se complètent l'une l'autre pour le service des laïcs dans leur propre mission particulière au sein de l'Église.
Une des grandes avances faites par le Concile Vatican II était d'expliciter le rôle distinctif et non-clérical des laïcs dans la grande mission de l'Église de Jésus-Christ, en clarifiant abondamment que leur mission particulière n'est pas d'agir comme auxiliaires au clergé dans l'organisation de la vie paroissiale ou diocésaine, mais de sanctifier le monde du dedans. La Constitution Dogmatique Lumen Gentium affirme énergiquement que "de par leur vocation propre, il revient aux laïcs de chercher le royaume de Dieu en administrant les choses temporelles, en les ordonnant selon Dieu... C'est là qu'ils sont appelés par Dieu... à travailler comme de l'intérieur, à la manière d'un ferment, à la sanctification du monde..., principalement par le témoignage de leur propre vie... C'est à eux qu'il revient particulièrement d'illuminer et d'ordonner toutes les choses temporelles auxquelles ils sont étroitement liés, en sorte qu'elles soient toujours accomplies selon le Christ" [5].
Les membres de l'Opus Dei, comme tels, ne s'engagent à aucune activité ecclésiastique propre à eux. Chacun s'efforce de réaliser ses obligations professionnelles et sociales de la manière la plus parfaite possible, avec toute honnêteté et par amour de Dieu. Pour les membres mariés, qui constituent la grande majorité, un champ également principal d'engagement est leur vie conjugale et familiale où ils s'efforcent pour être des époux et des parents exemplaires. Comme conséquence pratique, en chaque diocèse où il y a des membres de l'Opus Dei, ils accomplissent un travail constant et direct d'évangélisation, un service de la mission de l'Église, dont le bénéfice va directement à l'église locale sans que l'Opus Dei veuille ou cherche à en avoir aucun crédit ou avantage.
"Nous voulons servir l'Église comme l'Église veut être servie", a répété constamment St. Josémaria. Il n'est que logique qu'un membre de la Prélature qui vit dans une paroisse soit prêt à participer dans les activités de la paroisse, toujours à condition que ce soit compatible avec cet engagement antérieur à un apostolat séculier dans son milieu professionnel, ainsi que ses engagements vis-à-vis de sa famille. Ceux-ci représentent le premier champ de son service apostolique à l'Église conformément aux priorités indiquées par le Concile.
Aujourd'hui c'est de mode insister sur l'"intégration" dans le travail pastoral. Parfois on ne peut pas éviter l'impression que certains de ceux qui parle d'intégration ont une vision partielle et étroite de la vraie extension du travail pastoral de l'Église - de l'Église universelle et de chaque Église particulière; à la fois qu'ils semblent ne pas comprendre que chaque chrétien est déjà pleinement intégré dans cette mission pastorale et évangélisatrice quand il cherche, en accord explicite avec l'enseignement du Concile, de vivre sa vie professionnelle et familiale de façon a sanctifier de dedans le monde et toutes les activités séculières [6]
Renforcer le service rendu par la Prélature aux Eglises particulières
Jean Paul II a indiqué les effets pratiques de tout ça dans une adresse du 17 mars 2001 à des membres de l'Opus Dei assemblés à Rome pour étudier des manières d'appliquer la Lettre Apostolique Novo millennio ineunte [7]. Le Pape, en remarquant que la rencontre a été organisée "dans le but de renforcer le service rendu par la Prélature aux Eglises particulières, dans lesquelles ses fidèles sont présents", a souligné que la "nature hiérarchique de l'Opus Dei, établie dans la Constitution apostolique par laquelle j'ai érigé la Prélature (cf. Const. Apost. Ut sit, 28 novembre 1982), offre un point de départ pour des considérations pastorales riches d'applications pratiques. Je désire avant tout souligner que l'appartenance des fidèles laïcs tant à leur Eglise particulière qu'à la Prélature, à laquelle ils sont incorporés, fait que la mission particulière de la Prélature conflue avec l'engagement d'évangélisation de chaque Eglise particulière, comme le prévoit le Concile Vatican II lorsqu'il établit la figure des Prélatures personnelles" (n. 1).
Ensuite le Pape note comment les membres laïcs de la Prélature sont engagés dans un apostolat nettement séculier. "Leurs compétences spécifiques dans les diverses activités humaines sont en premier lieu un instrument qui leur est confié par Dieu pour permettre «à l'annonce du Christ d'atteindre les personnes, (de) modeler les communautés, d'agir en profondeur par le témoignage des valeurs évangéliques sur la société et la culture» (Novo Millennio Ineunte, no. 29). Ceux-ci doivent donc être encouragés à mettre de façon concrète leurs connaissances au service des «nouvelles frontières» qui s'annoncent comme autant de défis pour la présence salvifique de l'Eglise dans le monde" (n. 2).
Les «nouvelles frontières»
Quelles sont ces «nouvelles frontières» que, selon Jean Paul II, posent des défis à la mission rédemptrice de l'Église et où à son avis les membres laïcs de l'Opus Dei devraient être engagés activement? Peut-être pourrait-on les mieux définir en relation aux "vieilles" frontières, c'est à dire, à ce consensus général sur les standards moraux de base qui, jusqu'à très récemment encore, façonnait l'Occident, en lui donnant une culture commune. Eh bien, ces vieilles frontières se sont maintenant écroulées; pratiquement elles n'existent plus. Il n'y a plus des bornes entre le bien et le mal, il n'y a plus aucun accord sur ce qui est humain et ce qui est moins que humain, et l'homme occidental se trouve perdu dans un désert de relativisme éthique - un point sur lequel le Pape Benoît XVI insiste sans cesse.
C'est là - dans la vie économique, dans les affaires, dans la politique, dans les philosophies sociales et éducatives, dans la recherche scientifique, dans le respect pour la vie, dans la notion de la sexualité, du mariage et de la famille - où des idéaux vraiment humains et des valeurs morales objectives ne possèdent plus de poids décisif. Et c'est là qu'un doit établir des nouvelles frontières. C'est là qu'un nouveau programme de vie, un nouveau consensus sur les valeurs humaines, doivent être recréés. C'est sans doute une tache difficile - mais possible; surtout parce que les défis qu'elle offre sont très attractifs.
Il faut déployer le contenu de la «culture de la vie» - si instamment proclamée par Jean Paul II - en nous rendant compte que elle est caractérisée non seulement par la reconnaissance de la valeur de chaque vie dès la conception jusqu'à la mort naturelle, mais représente une culture, une civilisation, de personnes qui se sentent unies dans l'idéal de construire une cité vraiment humaine, où règne une confiance habituelle, où l'honnêteté est devenue la norme et pas l'exception - parce que les particuliers mêmes l'ont établie peu à peu dans leur milieu de travail et leur relations sociales; où le profit et la justice vont de main en main; où un profond amour pour les valeurs humaines et l'humanité inspire la recherche scientifique; où le but prioritaire de l'éducation est de former des personnes douées de idéaux civiques (capables pourtant de apprécier le noble aspect de service dont se caractérisent des professions comme la médecine, le droit, la politique...); et, aussi de manière spéciale, où une attitude de appréciation mutuelle, de admiration et de respect entre les sexes reparaisse, et où un idéal principal de ceux qui se marient c'est de injecter vigueur et vitalité - vie de famille avec personnalité - dans les familles qu'ils veulent former.
Dans la même adresse du 2001 le Pape a explicitement affirmé que des champs d'action de cette sorte, avec les défis qu'ils offrent, signalent les secteurs particuliers où les membres de l'Opus Dei peuvent servir la cause de la vérité. "Leur témoignage direct dans tous ces domaines", dit-il, "montrera que seul dans le Christ les valeurs humaines les plus élevées atteignent leur plénitude. Et leur zèle apostolique, l'amitié fraternelle, la charité solidaire les rendront capables de transformer les rapports sociaux quotidiens en occasions pour susciter chez leurs semblables la soif de vérité qui est la première condition pour la rencontre salvifique avec le Christ" (ibidem.).
Un direct témoignage seculier
Pourtant, ce que l'Église veut des membres de l'Opus Dei c'est un "témoignage direct" - du dedans des activités séculières - à la plénitude des valeurs humaines en tant qu'elles sont enracinées dans la vérité de Jésus-Christ. Il s'agit d'un point essentiel – quoiqu'il y ait des personnes qui ne le comprennent pas encore.
Ceux qui le comprennent se rendent compte immédiatement comment ce serait absurde d'attendre que les membres de la Prélature soient directement ou principalement engagés dans les affaires ecclésiastiques, ou dans les structures paroissiales ou diocésaines qui soutiennent la vie d'organisation de l'Église; de même qu'ils se rendent compte comment ce serait absurde de juger la nature de l'Opus Dei ou le travail de ses membres d'après le modèle de la vie religieuse.
Il est tout à fait clair, par conséquent, que les Prélatures Personnelles, comme c'était prévu dans le Concile Vatican II et dans le M.P de Paul VI, Ecclesiae Sanctae, représentent un développement - un enrichissement - des diverses modes selon lesquels l'Église, par droit humain, s'efforce de rendre plus efficace la mission essentiellement évangélisatrice qui est la raison d'être de sa structure hiérarchique.
L'Opus Dei concrètement, par son esprit et son but spécifiques, aide à inspirer et à former les fidèles laïcs pour être, dès leur place propre dans le monde, sel et levain pour toutes les activités professionnelles et séculières, pour les humaniser selon la vérité du Christ; humanisées, elles représenteront de nouveau le cadre naturel, purifié, pour l'opération efficace du Saint Esprit dans les âmes.
En partant d'une considération des "membres qui structurent organiquement la Prélature, c'est-à-dire des prêtres et des fidèles laïcs, hommes et femmes, avec à leur tête le Prélat", le Pape souligne la "nature hiérarchique de l'Opus Dei, établie dans la Constitution apostolique par laquelle j'ai érigé la Prélature".
En soi la phrase, "nature hiérarchique", utilisée par le Pape semble faire référence seulement à la structure interne de la Prélature. Cependant le terme "hiérarchique" a des connotations précises. Dans son usage théologique et technique il se reporte spécifiquement au "gouvernement sacré" dont Jésus-Christ a doté son Église et qui a été transmis par les Apôtres, en prenant plusieurs formes institutionnelles avec le passage du temps.
Peut-être le point devient plus clair si on considère qu'une institution religieuse ou une association laïque n'a pas de gouvernement sacré dans ce sens. Il a son propre régime interne mais, si on veut parler correctement, ceci n'est pas hiérarchique. Ou, pour le dire d'une autre façon, seulement des institutions qui participent à la constitution hiérarchique de l'Église peuvent être structurées dans un sens proprement hiérarchique.
Dans le nouveau Code de Droit Canonique de 1983 on traite des Prélatures Personnelles dans le Livre Deux, "Le Peuple de Dieu". Cependant, leur placement présent - dans la Première Partie de ce livre ("Les Fidèles de Jésus-Christ"), et non pas dans la Deuxième Partie ("La Constitution Hiérarchique de la Église") - doit être considéré comme une anomalie technique [8]. Pendant le travail pour la préparation du nouveau Code, les Prélatures Personnelles étaient d'abord placées parmi les canons qui traitent de la Constitution Hiérarchique de l'Église; et en fait ces Prélatures continuent à être traitées ainsi dans la praxis du Saint Siège. On le peut constater notablement dans l'Annuario Pontificio, l'Annuaire officiel du Vatican, où les Prélatures Personnelles ont été constamment inscrites comme un groupement de plus (avec les Diocèses, les Vicariats, les Ordinariats ou les Prélatures Territoriales) dans la composition hiérarchique de l'Église [9]. On trouve la même chose dans le Directoire pour le Ministère et la Vie du Clergé de 1994 [10], dans la Constitution Apostolique de 1998 Ecclesia in Urbe (n. 0), et (en ce qui concerne le cas spécifique de l'Opus Dei) dans le fait de l'érection du tribunal de la Prélature.
NOTES
[1] dont chacun avait une juridiction personnelle universelle.
[2] bien que le terme 'diocèse' dans son sens actuel n'est pas universellement utilisé jusqu'au 10ème siècle
[3] "Prélat" est un terme générique appliqué à l'ecclésiastique chargé du gouvernement d'une portion particulière du Peuple de Dieu, ou qui a juridiction sur le Peuple sous quelque respect concret. Le prélat est normalement un évêque, mais parfois il a été un abbé, et assez souvent encore aujourd'hui, surtout dans les secteurs nouvellement évangélisés, un simple prêtre mais doté du pouvoir de gouvernement ou de juridiction, qui est toujours implicite dans le terme "prélat". Les juges de la Rote Romaine, par exemple, sont des "Prélats-auditeurs", en tant qu'ils jouissent d'une juridiction universelle dans leur propre champ judiciaire.
[4] Paul VI, Motu proprio Ecclesiae sanctae, I, n. 4: AAS 58 (1966) 760-761.
[5] n. 31. cfr. "les laïcs sont par-dessus tout appelés à rendre l'Eglise présente et agissante en tout lieu et en toute circonstance où elle ne peut devenir le sel de la terre que par leur intermédiaire" (LG 32); "Il y a dans l'Eglise diversité de ministères, mais unité de mission. Le Christ a confié aux Apôtres et à leurs successeurs la charge d'enseigner, de sanctifier et de gouverner en son nom et par son pouvoir. Mais les laïcs rendus participants de la charge sacerdotale, prophétique et royale du Christ assument dans l'Eglise et dans le monde leur part dans ce qui est la mission du Peuple de Dieu tout entier. Ils exercent concrètement leur apostolat en se dépensant à l'évangélisation et à la sanctification des hommes: il en est de même quand ils s'efforcent de pénétrer l'ordre temporel d'esprit évangélique et travaillent à son progrès" (Apostolicam Actuositatem, n. 2).
[6] J'insiste que personne arrivera jamais a comprendre bien ce point si continue à considérer la question d'intégration du point de vue d'organisation ecclésiastique, dirigée par les mêmes ecclésiastiques, et ne pas du point de vue de mission apostolique personnelle que correspond par droit ecclésial (cfr. cc. 208, 211, 225-227) et, ce qui est plus important, par volonté divine, a chaque chrétien en tant que récepteur d'un charge impérative du Christ d'être sel et lumière du monde (Mt 5:13-14).
[7] cfr. L'Osservatore Romano, 18 mars 2001.
[8] introduite pendant la dernière révision de l'avant-projet du Code avant sa promulgation, et due sans aucun doute au désir d'éviter toute possible identification des Prélatures avec les Églises Particulières (cela toutefois aurait pu être accompli simplement en plaçant les Prélatures Personnelles dans une nouvelle troisième Section dans la Deuxième Partie).
[9] cf. "Statistica della Gerarchia Cattolica", Annuario Pontificio (2007), pp. 1172-1173.
[10] "en raison du Sacrement des Ordres Sacrés chaque prêtre est uni aux autres membres du clergé par des liens spécifiques de charité apostolique, de ministère et de fraternité. Il est de fait inséré dans l'Ordo Presbyterorum qui constitue cette unité qu'on pourrait définir comme une vraie famille dans laquelle les liens ne proviennent pas de la chair ni du sang mais de la grâce des Ordres Sacrés. Cette adhésion dans un presbyterium spécifique, vient toujours dans le contexte d'une Église particulière, d'un Ordinariat ou d'une Prélature personnelle. En fait, et contrairement au cas du Collège des Évêques, il paraît qu'il n'y a pas de fondation théologique pour affirmer l'existence d'un Presbyterium universel" (n. 25).